ENTRE JEUNESSE DORÉE ET JEUNESSE TOUT COURT, L’ADOLESCENCE AU MAROC PEUT ÊTRE VÉCUE DE MILLE ET UNE FAÇONS

Moi, je ne me situe ni dans l’une ni dans l’autre. Mon adolescence à moi, je la vis avec les deux ou plutôt entre les deux.  Ici, au Maroc, la jeunesse dite « dorée » se démarque beaucoup par ses fréquentations, ses loisirs, son éducation. En réalité c’est tout un mode de vie. Un mode de vie souvent inaccessible voire inimaginable pour le reste de la population. Par exemple quand une jeune adolescente trouve tout à fait « funny » de s’acheter le petit porte-clefs à la mode de chez Fendi, une autre n’en comprend pas même l’utilité.  Et comme tout le monde le sait, c’est souvent dans les détails que se cache le diable…
Le film Maroc  réalisé par Laïla Marrakchi en 2005 parle de la vie de jeunes issus de cette fameuse « jeunesse dorée : oui, c’est vrai,  nous rêvons toutes d’un Youri ! un grand fossé se creuse  entre les adolescents issus d’un milieu social privilégié et ceux  issus d’un milieu modeste.
COMMENT RÉAGIT UN JEUNE MAROCAIN FACE À CETTE INÉGALITÉ ?
Ce phénomène est source d’une grande frustration venue d’un sentiment d’infériorité car finalement  « Pourquoi pas moi ? ». Frustration qui ne tarde pas à se ressentir dans les rues. Quand Mehdi se trouve honorable d’avoir bien traité son chauffeur  ou encore que Sofia se trouve gentille lorsqu’elle se comporte bien avec sa femme de ménage, c’est qu’il y a un problème : un problème de mixité sociale qui cloisonne ainsi la population dans des cases divisant sa jeunesse.
CETTE ADOLESCENCE DITE «  INSOUCIANTE », QUI NOUS EMPORTE VERS TOUS LES CHEMINS, N’EST PAS FACILE À VIVRE AU MAROC.
En effet une jeune marocaine ne peut clairement pas se promener à n’importe quelle heure du soir habillée comme elle le souhaite. Je m’explique, le mot « éducation » désigne deux choses à la fois : l’éducation que l’on reçoit à la maison (bonnes manières etc.) et l’autre celle des connaissances intellectuelles, culturelles, morales que l’on reçoit généralement à l’école. Je crois que là est la source du conflit. D’après moi la frustration dont je vous parlais est directement liée au manque d’éducation. Celle que l’on reçoit à l’école est trop souvent archaïque, voire particulièrement machiste. Ce poids, nous devons le porter, nous les marocaine, et croyez moi, il est très lourd !
L’ART A TOUJOURS ÉTÉ LE MEILLEUR MOYEN QUE J’AI TROUVÉ POUR M’ÉVADER, C’EST DONC UNE APPROCHE TRÈS SPIRITUELLE QUI ME RELIE À CELUI-CI.
La dernière fois que je suis allée à Paris j’ai vraiment était surprise de voir qu’en tant qu’adolescente j’avais vraiment la possibilité de visiter presque tous les musées sans rien devoir payer. Cette accessibilité, cette ouverture vers la culture et l’art est selon moi l’un des piliers du développement personnel et j’irai même jusqu’à dire l’un des piliers d’un développement durable. Ouvrir ces espaces culturels aux jeunes encouragerait notre ouverture d’esprit. D’après moi nos centres d’intérêt sont énormément influencés par notre environnement social. Cette approche permet de rendre la culture libre, simple et sans convention. À la manière de Niki de Saint Phalle, apprenons à démocratiser l’accès à l’art.
AU MAROC L’OUVERTURE DES ESPACES CULTURELS RESTE MINIME NÉANMOINS EN PLEINE EXPANSION.
Notre musée d’art moderne à Rabat organise désormais des portes-ouvertes tous les vendredis. La villa des arts de Rabat et Casablanca offrent des expositions et pièces de théâtre destinées à tout public, tous les jours de l’année. Rabat est également connue pour son festival Mawazine qui accueille chaque année des artistes venus du monde entier. Le monde culturel marocain est donc en plein essor… Si nous n’y avons pas encore accès gratuitement, les prix y sont de plus en plus accessibles ce qui permet aussi aux habitants des quartiers les plus défavorisés de participer également à cet événement. Quand on me demande ce que c’est que d’être une ado au Maroc je n’ai pas la réponse sur le bout des lèvres.
IL Y A UNE SEULE ET UNIQUE QUESTION QUI NOUS TIRAILLE TOUS, RICHES ET PAUVRES, FILLES OU GARÇONS : COMMENT CONCILIER TRADITION ET MODERNITÉ ?
Alors moi, j’essaie de voir les choses des deux côtés du miroir. Comme toute culture la nôtre se doit d’être préservée et respectée. Quant à la mentalité elle ne peut pas changer du jour au lendemain, il faut donc apprendre à être patient, à l’amener doucement vers une plus large ouverture d’esprit. En tant que jeune adolescente marocaine j’ai fait le choix de vouloir un meilleur avenir pour mon pays, un meilleur développement intellectuel et spirituel tout en préservant nos rites et coutumes.
Mon beau pays je l’aime mais j’aspire à un changement, j’aspire à un avenir où tous les jeunes de tous les horizons seront placés sur un même pied d’égalité.
MON MAROC EST BEAU, RICHE ET CHALEUREUX.
Et surtout il possède une multitude de potentiels. Alors entre jeunesse dorée et jeunesse tout court j’ai fait le choix d’apprendre à faire ma place, d’apprendre à me démarquer par mon savoir, mon éducation et non pas par mon nom de famille. Et parce que moi j’ai fait ce choix, celui de croire en mon pays je ne baisserai jamais les bras.
Salma Laalj, 1èreES4

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